CHRONIQUE / À la ferme comme à la maison!

À tout bout de champ, on voit des entreprises agricoles familiales passer de génération en génération. On peut s’imaginer une histoire bucolique d’une belle grande famille qui se relaie dans les travaux dans l’harmonie et de parents qui lèguent le fruit de leur travail acharné lorsqu’ils seront prêts pour la retraite, mais qu’en est-il vraiment ?

Lors d’un transfert de ferme, il faut prendre des ententes entre parents, enfants, frères et sœurs, plutôt qu’avec un investisseur et décider comment l’entreprise sera transmise. Comme il existe autant de situations qu’il existe d’entreprises, il n’y a pas de recette miracle pour le faire.

L’exemple d’une grande famille agricole de Granby

Pour les Fermes Beaudry Inc., depuis quelques années, deux des fils de M. Beaudry ont commencé à prendre plus de place dans l’entreprise. En présence de ces jeunes passionnés par l’agriculture, le père Beaudry a eu envie de les laisser s’épanouir dans l’entreprise. Aujourd’hui, le patriarche s’occupe principalement des communications. Simon s’occupe de la gestion des animaux et Étienne de la machinerie et de la gestion des cultures. Pour assurer le bon partage des informations, l’équipe se rencontre tous les lundis. Si les relations familiales vont bien, c’est qu’ils ont fait affaire avec des coachs d’entreprise pour structurer les échanges, autant d’un point de vue administratif qu’humain.

Toujours dans le but d’améliorer la communication autour de l’entreprise, M. Beaudry fait partie d’un groupe d’essai avec d’autres producteurs et deux conseillers spécialisés dans la gestion des relations sur les entreprises agricoles. La discussion avec divers producteurs qui vivent des situations semblables lui permet d’avoir une nouvelle vision de certaines problématiques relationnelles qui peuvent s’immiscer à la ferme.

Il faut comprendre que travailler en famille veut aussi dire gérer les malentendus et les frictions qu’il pourrait y avoir. Pour éviter de vivre des chicanes d’entreprise en plein souper de Fêtes, une solution est de s’entourer de professionnels qui pourront aider à la prise de décision. Il existe des conseillers spécialisés en transfert de ferme. Dans la région, il y a Émylie Cossette, conseillère en relations humaines et en transfert de ferme au groupe Proconseil, qui est présente pour faciliter la discussion entre partenaires d’une même entreprise.

En faisant appel à un intermédiaire, on augmente les chances de bien se comprendre. En famille, les émotions peuvent facilement prendre le dessus, une personne extérieure permet ainsi d’avoir un œil plus éclairé sur la situation, diminuant la pression sur la famille. Le côté humain, c’est fragile, et ça demande parfois un peu de tact et de recul pour venir à bout d’un conflit ou d’une mésentente.

Une réalité différente

Photo de la famille Beaudry

Lorsque Robert Beaudry a repris la ferme de son père, les entreprises se rachetaient. Ainsi, avec l’un de ses frères, il a pu racheter la ferme familiale et devenir propriétaire. Les prix de l’époque permettaient de faire ce genre de transaction. Aujourd’hui, le prix des terres est très élevé et cause un endettement énorme pour la jeunesse qui se lance en agriculture. M. Beaudry a trouvé plus important de continuer à vivre avec ses enfants de

l’agriculture, c’est pourquoi il n’est pas question de vendre la ferme, mais plutôt de la transférer avec une rente à vie.

Une question demeure : la retraite en agriculture, est-ce que ça existe vraiment ? L’agriculture, c’est plus qu’un métier, c’est une passion et un mode de vie. De la cuisine de M. Beaudry, on voit très bien l’étable et les mouvements qu’il y a à la ferme, mais comme le dit si bien Robert Beaudry : « Quand on installe la relève, le papa doit apprendre à lâcher prise. »